Nos anciens écrivaient
1539-1619
Il y a quatre siècles exactement disparaissait Olivier de Serres, souvent désigné comme « le père de l’agronomie moderne ». Nous lui devons l’enrichissement des sols par la culture de plantes fourragères, l’introduction des légumineuses, des travaux de référence sur l’irrigation… Des expérimentations quasi scientifiques à l’époque et dont aujourd’hui le bon sens trouve une résonance partagée sur les routes de la transition écologique engagée en ce 21e siècle.
OLIVIER DE SERRES en 1600 ( Le théatre d'agriculture et mesnage des champs). écrit en vieux français
La poule : "La plus souhaitable race de poules, est celle qui a la délicatesse de la chair, fournit des oeufs en abondance,la plus-part des saisons de l'année. Telles qualités se treuvent le plus souvent en celles qui sont de moyenne corpulence, qu'ès autres trop grandes ou trop petites, et ès noires et tanées, qu'ès blanches, emplumées de couleur claire. Les noires par dessus les autres sont louées des médecins, pour la qualité de leurs oeufs, qui sont fort sains, et de la ménagère pour abondance: attendu que les poules de pennage noir, sont plus joyeuses et robustes, que celles de blanc. Pour cceste cause aussi sont moins prisées les blanches,qu'elles sont plus sujettes au oiseau de proie, que les noires: par facilement se descouvrir de loin leur couleur. La creste pendante d'un costé est signe certain de fertilité. les ergots et esperons hautement posés à costé des jambes(marque masculine), la difficulté de se laisser couvrir, dont elle est et moins fertile en oeufs, et moins propre à couver ; par impatience cassant les oeufs avec ses ergots " .
Le coq : " Que le coq soit de moyenne taille, toutes-fois plus grand que petit: de pennage noir ou rouge-obscur; ayant les pieds gros,garnis d'ongles et de griffes, avec les ergots forts et acérés : les jambes fortes ,et tout cela de couleur jaune : les cuisses massives et fournies de plumes : la poictrine large : le col eslevé et fort garni de plumes de diverses et variantes couleurs, comme dorées, jaunes, violettes ou rouges : la teste grosse et eslevée: la creste rouge comme escarlate; grande, redoublée, crespelue : le bec gros et court : les yeux noirs et brillants; les aureilles larges et blanches; la barbe longue et pendante: les aisles fortes et bien fournes de pennage: la queue grande et haute, la portant redoublée par dessus la teste. sera aussi le coq esveillé, chaud , courageux, remuant, robuste, prompt à chanter, affectionné à défendre ses poules, et à les faire manger.".
"moins de deux coqs ne doit-on entretenir, car qui n'en a qu'un, n'en a poinct , pour les fréquentes et inopinées pertes qui en aviennent.. dont ainsi pouveus, quand un coq défaut , l'autre y supplée, en attendant nouveau secours : sans quoi demeureroit-on en peine........A deux coqs conviennent vingt-cinq ou trente poules, puis que la charge d'un seul est de douze ou quinze ".....
"Pour couver,seront choisis de grands oeufs, car de tels, comme a esté dict, vient la grande poulaille. Et si on désire avoir plus de masles que de femelles, y en mettra-on plus de poinctus que de mousses :d'autant que selon l'antique et curieuse recerche, de ceux-là sortent les coqs, et de ceux-ci les poules.....Mais on les choisira de dix ou douze jours, et fort pesans, c'est assavoir jusques là, que l'eau ne les puisse porter. Par laquelle espreuve, l'on discernera les bons oeufs d'avec les mauvais, quand en les plongeant tous dans tous dans l'eau fresche, l'on rejette pour couver ceux qui nagent au dessus,retenant les autres qui tumbent au fond,comme aussi les meilleurs à manger.....Est de besoin prendre garde à la lune, d'autant que plus facilement naissent les poulets en sa montée, qu'en sa descente :par quoi faudra mettre couver les oeufs sur la fin du croissant, pour esclorre au commencement d'icelui."
Nota : Ce texte était écrit en vieux français
BUFFON en 1739 ( oeuvres de Buffon tome7 , augmentées de la classification de G. Cuvier).
" Un bon coq est celui qui a du feu dans les yeux, de la fierté dans la démarche, de la liberté dans ses mouvements et toutes les proportions qui annoncent la force"
" on doit choisir les poules qui ont l'oeil éveillé,la crête fflottante et rouge, et qui n'ont point d'éperons: les proportions de leur corps sont en général plus légères que celles du male, cependant elles ont les plumes plus larges et les jambes plus basses. Les bonnes fermières donnent la préférence aux poules noires, comme étant plus fécondes que les blanches et pouvant échapper plus facilement à la vue perçante de l'oiseau de proie qui plane sur les basses-cours."
REMY SAINT-LOUP en 1895 ( Les oiseaux de basse-cour )
Race Gauloise:
" Lorsque l'on examine les différents types de coqs qui se rencontrent dans les fermes de la France, on remarque quelquefois un oiseau au plumage éclatant, aux nuances variant des tons de l'or à ceux du rouge ardent, orné aux ailes et à la queue de plumes foncées,dont les reflets verts ou bleus font contraste avec les autres nuances. La forme de l'oiseau est aussi gracieuse que les couleurs en sont agréables. Il est bien proportionné sans trop de longueur de cou, ni des pattes, sa queue s'arrondit en un panache qui n'est ni grêle, ni pesant, il donne satisfaction à ce goût artistique que chacun possède..... Cet oiseau doit être appelé le coq Gaulois, il se trouve surtout dans les campagnes éloignées des grandes voies de communications......Pourquoi la préconiser , ou plutôt la tirer d'oubli ? D'abord, parce que cette race est éminemment rustique. ... Nous ajouterons que cet oiseau est interessant parce qu'il est sans doute le type le plus voisin de celui des coqs sauvages ...
DESROCHES; début du 20 e siecle ( coqs,poules, oies, canards élevage soins et remèdes)
" Lorsque l'ont parle de poularde il est naturel de penser aux volailles Bressoisses.
La Bressoise ou poularde de Bresse occupe une place distinguée parmi les volailles fines. Le coq de la Bresse a le plumage de la poitrine et du dos blanc. Quelques plumes blanches tranchent sur les ailes dont le fond est noir. Les faucilles sont noires avec quelques raies ardoise. Le ton général de la poule est gris avec plumes blanches à la poitrine et au ventre et extrémité de la queue tirant vers le noir.
Sait on que la poularde de Bresse faillit avoir sur la conscience la mort du célèbre gastronome Brillat-Savarin ?
On était au jours troublés de 1791 et Brillat-Savarin, magistrat de l'ancien régime, se disposait à émigrer en Suisse, car il sentait sa liberté et par conséquent ses jours menacés. A peu de distance de la frontière, rien ne lui indiquant qu'il était l'objet de poursuites immédiates il entre dans une auberge pour y célébrer les rites important du diner de midi. Quel spectacle ! Devant l'âtre qu'échauffait un feu de bois brillant et clair, la plus belle poularde de Bresse qu'il ai jamais vue, obéissant à la douce impulsion du tourne broche, tournait et tournait , rotissant. Le jus dont l'arrosait de temps à autre un gamin chargé de ce grave office, tempérait les ardeurs du feu, bonifiant les chairs en cuisson, rendait onctueuse la peau un peu soulevée et que l'on devinait un légèrement croustillante.
Oh quelle poularde !
Absolument dominé par l'envie d'en gouter et sachant qu'elle était destinée à la table de quelques personnes qui paraissaient mener joyeuse vie dans une salle réservée. Brillat-Savarin put décider l'hotesse à demander pour lui la permission de s'assoir parmi ses joyeux voisins et de participer, en payant son eco bien entendu, à la dégustation de la poularde. Cette permission fut accordée. Pendant près d'une heure le mérite de la volaille d'abord, ensuite l'esprit de Brillat et aussi l'esprit de quelques bonnes bouteilles, mirent en liesse toute la compagnie. Le moment venu de se séparer ont le fit avec l'expression des plus vifs regrets. Quelle ne fut pas la stuppeur des convives, commissaires de la Convention, lorsqu'ils reçurent, alors que leur compagnon d'une heure avait assurément passé la frontière son nom, son signalement et....l'ordre de l'arrêter !
Voilà comment le goût immodéré pour la poularde peut risquer de vous conduire à l'échaffaud "
Charles VOITELLIER en 1918 ( Aviculture ).
" La renommée de la volaille que l'on produit en Bresse est fort ancienne... les éleveurs n'avaient pas été sans remarquer que les poules dont le plumage n'avait pas de trace de rouge, dont les pattes n'étaient pas jaunes...avaient la chair et la peau plus fines et étaient les plus estimées.
La fixation des caractères de la race, l'adoption d'un type unique et une sélection conforme à ce type remontent tout au plus à 1875. La variété grise parut tout d'abord mériter seule la renommée de la poule de Bresse.La noire était cependant celle qui y avait le plus de droits. Les croisements dont la première fut l'objet contribuèrent à assurer le triomphe de la seconde. Les éleveurs qui s'adonnaient à la production de la variété grise dite de Bourg, voulurent en augmenter le format et allèrent chercher, à cet effet, leurs reproducteurs dans le pays où il y avait eu, comme en bien d'autres régions à cette époque, des introductions de Brehma ou Cochinchinois. Plus tard, ils trouvèrent que son plumage gris brouillé, manquant d'uniformité, n'était pas assez distingué, et il y eut des unions avec la Campine Belge,si fréquentes et si cachées cependant qu'il devint difficile de distinguer l'une de l'autre et qu'on put affirmer, avec apparence de raison, que la Campine Belge etait la Bresse grise et réciproquement.
Les producteurs de la variété noire dite de Louhans, ne cherchèrent quà conserver le type de la poule qui leur donnait toute satisfaction, et en fixèrent les caractères tels qu'ils les connaissaient de longue date.
On peut, en conséquence, établir une ligne de démarcation très nette entre la varièté noire, d'une part, et les variétés grise et blanche, d'autre part, tant au point de vue de leurs caractères que de leurs qualitès.
Le format de la grise est plus grand.....celui de la blanche est identique. Le squelette de la noire est relativement plus fin, plus réduit. Ces variétés diffèrent aussi par leurs conformation.La noire a les épaules moins saillantes, moins écartées, la poitrine moins carénée que la grise et la blanche; le dos, les pattes et le cou moins longs. La forme de la tête est seulementla même, longue et fine.
Comme caractères communs , elles n'ont que la crête simple, moyenne, peu proéminente à l'avant, portée droite chez le coq, pliée chez la poule, les barbillons longs sans exagération et fins; les oreillons moyens, blancs mat, les doigts au nombre de quatre.
On considèrent comme caractères essentiels de la Bresse noire, la couleur brune, presque noire de l'iris et de la prunelle, constituant ce qu'on appelle l'oeil de vesce.
Le plumage de la variété grise a seul besoin d'être défini. Le coq a le camail, le dos, les lancettes, le plastron et les ailes de couleur blanche; ces dernières ont deux barres noires transversales, les plumes du ventre et des cuisses sont grises; toutes les plumes de la queue sont noires, à l'exception des faucilles qui sont bordées d'un liseré blanc. La poule n'a que le dos, le dessus des ailes et la queue de couleur grise; le reste du corps est blanc.
La Bresse noire a pour qualité principale une finesse de chaire exceptionnelle, rehaussée par sa blancheur, et une peau très fine. La graisse est absolument blanche......La Bresse grise est peut être , encore un peu plus rustique et plus précose, aussi bonne pondeuse et meilleure couveuse, elle ne lui est inférieure que pour la qualité de la chair. La Bresse blanche a des qualités identiques."
Louis SERRE en 1944 ( les incomparables races de poules françaises ).
"Ce qui peut, lorsqu'on observe bien, paraître étrange dans la Bresse, c'est qu'étant une race essentiellement utilitaire, elle est, dans son allure, aristocratique jusqu'à l'invraisemblance. Admirez un coq Bresse noire, bien typé. Quel oiseau magnifique! Suprêmement élégant,finement racé, le spendide panache de sa queue lui donne une superbe à nulle autre pareille. Sa ligne est à la fois d'une grâce désinvolte et d'une fière noblesse qui font l'admiration des amateurs d'oeuvres d'art. On serait porté à croire que la Bresse a été créée pour l'élevage sportif, l'élevage d'amateurs férus de prix aux expositions. Et cependant ce petit miracle d'élégance est au premier rang des poules utilitaires, se prête à merveille à l'aviculture dite industrielle. Vraiment il n'y a qu'en France qu'il se peut voir semblables choses, et si la Bresse n'était bressane depuis des siècles, on serait en droit de supposer qu'elle a été créée à Paris, rue de la Paix"